lundi 3 février 2014

À la marelle




Ce matin-là elle avait un peu de temps pour elle, rien que pour elle…
Elle ressentit alors un vent de liberté accompagné d’un parfum d’enfance, comme lorsqu’elle jouait à la marelle, sautillant de case en case pour atteindre le ciel… À chaque fois elle tendait les bras à l’horizontale, victorieuse, prête à s’envoler, mais revenait très vite sur Terre, ses petites camarades impatientes de lancer à leur tour le palet – généralement une boîte de cirage ronde et plate remplie de sable. Yeux fermés, ces quelques secondes en arrêt sur le mot ciel lui procuraient un indescriptible sentiment de liberté.
Elle sortit, scrutant le sol, mais aucune marelle n’avait été dessinée… Ce temps-là était-il révolu ? Si elle avait eu une craie sous la main, elle aurait bien remis un pas dans son enfance, juste pour retrouver un court instant des sensations oubliées.
Elle s’arrêta et sourit. Bien sûr qu’elle n’avait rien oublié, tout était là, en elle.
Elle reprit sa marche, abandonnant derrière elle le rire joyeux des fillettes aux jupes plissées, les cheveux retenus par un turban.
Elle ne ressentait aucune nostalgie, même si son cœur se gonflait soudain à se souvenir lointain…

Texte © Marie-Laure Bigand

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