vendredi 6 septembre 2013

Dans cette gare…


 

Dans cette gare où je t’attends, j’observe tous ces gens en attente d’un train ou de quelqu’un…
Dans cette gare où je t’attends, je me demande si tu viendras.
Tant de trains t’ont amené à moi, mais aujourd’hui il me semble que quelque chose n’est plus comme avant.
Autour de moi la vie fourmille. J’erre au milieu de passants qui savent pourquoi ils sont là.
Une femme crie après son mari parce qu’il ne marche pas assez vite ; une jeune femme, rollers à la main, fixe le tableau des arrivées, un sourire heureux sur son visage ; une petite fille court après un pigeon ; un couple s’embrasse à n’en plus finir, leurs bagages à leurs pieds ; à la terrasse d’un café un homme boit un verre de vin blanc, attend-il son amoureuse ? ; un homme pousse un fauteuil roulant où une vieille dame, très élégante, se tient bien droite ; un peu plus loin un groupe de jeunes gens, sacs à dos, s’esclaffent…
Depuis combien de temps suis-je là à regarder, sans vraiment les voir, toutes ces personnes qui ne sont pas toi ?
Tu n’es pas descendu du train où je t’espérais, ni du suivant, ni de celui d’après…
J’ai scruté à m’en étourdir les voyageurs qui se déversaient sur le quai.
Aucun message de ta part !
Je cherche mille raisons à ton absence.
Dans cette gare où je t’attends, je n’ai pas vu les heures s’écouler, je n’ai pas vu qu’il n’y avait presque plus personne.
C’est le silence qui m’a réveillée ; je m’étais habituée au brouhaha incessant.
Une voix ivre m’interpelle, un SDF perdu au milieu de ce hall qui m’apparaît soudain si grand et si vide.
Je frisonne et je réalise que tu m’as dit quelques jours auparavant que tu ne viendrais pas, que tu ne viendrais plus.
Seulement je n’y ai pas cru.
J’ai désespérément attendu le moment où je t’apercevrais et où tes bras m’enserraient, comme avant.
Dans cette gare où je t’attends je prends conscience que tu m’as quittée : un billet sans retour possible.
Dehors la nuit est tombée. La façade de la gare se dresse, magnifique, tandis que je traîne mon chagrin dans les rues de Paris, collé à ma peau à m’en étouffer.
J’ai raté le dernier train de banlieue pour rentrer chez moi.
Ta silhouette, ton sourire et ton élan vers moi sont désormais à conjuguer au passé…

Texte © Marie-Laure Bigand
 

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